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Prémonition[Web]
No 11 - Automne 1992
Planète Zen

La famille Simpson se moque de la polémique dont elle est le centre, à savoir si elle est le meilleur ou le pire groupe français du monde et du siècle, et s'évertue à faire de la musique, la sienne. A la question "N'y aurait-il pas un tantinet d'opportunisme à user de la guitare de cette manière là à notre époque?", ils répondent simplement en affichant leur satisfaction d'avoir enfin eu la chance de poser sur disque ce qu'ils murissent depuis un bout de temps.
Les insupportibles qui voient des pourris partout sont peut-être un peu trop paranoïaques, et nous nous attachons à encenser ces Simpsons-là, Stéphane, Christophe, et l'adorable Muriel, tant "Planète Zen - Le Disque" nous a mis dans tous nos états. Muriel aussi d'ailleurs.


Où en serait Planète Zen s'il n'y avait pas eu Lenoir?
Stéphane: Il n'y aurait pas eu de maxi!
Muriel: Il a flashé sur un titre, et à partir de là il en a fait une barraque monstrueuse. On était en train d'enregistrer l'album lorsqu'il a craqué sur la maquette. On s'est retrouvés presque obligés de faire le maxi, ce qui n'était absolument pas prévu au départ.
Aviez-vous démarché les maisons de disques?
Christophe: On a envoyé des démos un peu partout, on s'est fait refuser à chaque fois... Et c'est Rise And Fall qui nous a présentés à Thevenon (Single KO - ndlr).
Muriel: On a commencé nos démos en Juillet 90, il y a deux ans. On a enregistré Charlie the spacedriver sur le quatre pistes de Pascal avant même d'en avoir un nous-mêmes. Jusque-là, on enregistrait ce qu'on faisait sur notre chaîne hi-fi. C'est Christophe qui a pris l'initiative d'envoyer les démos, on n'était pas vraiment prêts.
Vous êtes allés en studio avant de signer...
Christophe: On voulait profiter du studio de Rise And Fall. Ce sont des amis de longue date. Ca leur a plu de nous filer un coup de main.
Muriel: Ils ont proposé à Thevenon de nous produire, sinon ils comptaient le faire eux-mêmes... il s'est retrouvé obligé d'écouter.
Christophe: Après, il nous appelait toutes les cinq minutes pour avoir une nouvelle cassette... et dès qu'il en avait une, il l'écoutait jusqu'à user la bande! Il en a bouffé trois...
Muriel: Ils faut voir sur quoi il écoute les K7, il a un walk-man avec deux petites enceintes branchées dans son bureau ou un autoradio de merde (rires)!
Comment avez-vous réagi à l'enthousiasme conjugué de Lenoir et Thevenon?
Muriel: On était à peine en studio quand Lenoir a passé les morceaux et décrété qu'on était le meilleur groupe du monde (rires). On ne s'attendait pas à ce que ca parte dans un délire comme ça! Il a saoulé tout le monde avec sa K7 avant même qu'on ait sorti quoi que ce soit. Il a commencé à nous matraquer le 22 Janvier, et le maxi est sorti le 23 Mars...
Il y a donc un virus qui les a touchés tous les deux!
Stéphane: Louis Thevenon nous a signés sur quatre titres. Il n'a vraiment pas eu peur!
Muriel: On n'arrivait pas à le croire, il en faisait peut-être même un peu trop. Il nous a parlé contrat tout de suite, l'air pas sûr du tout qu'on allait accepter. Et la deuxième fois qu'on l'a vu, il était étonné qu'on veuille déjà signer. Il ne l'avait pas préparé il s'était un film comme quoi nous avions plein de demandes en mariage avec les maisons de disques (rires).
Ca ne vous a pas fait peur?
Muriel: Ca dépend de l'idée que tu te fais au départ... On ne s'est jamais dit qu'on allait vendre un milliard de disques et rentrer dans le Top 50 (rires). On s'était juste dit que c'était génial quoiqu'il advienne.
Quelles ont été les réactions à la sortie de l'album? En avez-vous vendu beaucoup?

Stéphane: Personne ne l'a acheté! On en a vendu 2000, pas plus.
Muriel: Oui, vraiment pas beaucoup. Tous les fanzines ont été trés sympas avec nous, ils en ont dit beaucoup de bien. Mais les Inrocks ont quasiment fait l'impasse. Il y a quand même eu Rock&Folk et Best, ils ont un peu parlé de nous.
Que pensez-vous de l'attitude des Inrocks?
Muriel: Prends Viviant par exemple, il va dire à certains qu'il nous aime bien, et après, il ne pourra pas s'empêcher, en faisant la chronique dans Libé, de dire deux ou trois conneries méchantes et gratuites.
C'est peut-être mieux pour vous, après la façon dont ils ont cassé d'autres groupes français?
Muriel: A mon avis ça ne joue pas tellement. On a vendu plus en province qu'à Paris, et ce sont justement les fanzines qui nous ont aidés. D'un côté, c'est justifié que les Inrocks ne parlent pas de nous, ce n'est pas complètement leur créneau musical, mais d'un autre ils ne font pas leur boulot de journaliste qui serait de faire découvrir tout à tout le monde. Peut-être qu'ils s'y sont pris trop tard; ce n'est peut-être pas intéressant de faire une chronique sur nous alors que tout le monde l'avait déjà faite.
Parlons des concerts. Le premier, à l'espace européen?
Muriel: On a failli ne pas le faire tellement l'organisation était merdique. Ce n'était pas du tout la faute du mec de la salle, mais les Yo La Tengo sont arrivés avec deux heures de retard, sans avoir prévenu.
On ne pouvait pas faire notre balance car on jouait avec leur matériel. On les attendait, et quand ils sont arrivés on s'est bien sûr précipités pour les aider à installer leur matos, et on peut dire qu'ils ont été aimables comme des portes de prison. Tout le monde avait envie de se taper dessus!
Nous avions un son crade, nous ne nous entendions pas, c'était horrible. On a joué mais je me demande encore comment on a fait! J'ai chanté les deux derniers morceaux sans m'entendre du tout! La batterie n'était même pas sonorisée!
On avait vraiment les boules car plein de gens nous attendaient à ce concert, notamment des professionnels. Le public était content, mais ils aimaient la musique, alors que les pros attendent autre chose, ils se foutent pas mal de ce que tu fais, eux ils veulent un résultat carré. Si nous avons joué tout de même, c'est parce que tous nos copains étaient là, mais on a vraiment failli ne pas le faire.
Et passer d'une salle de 200 personnes à un endroit énorme comme Belfort, ça ne vous a pas fait peur?
Muriel: On avait beaucoup mois d'appréhension. C'était plus difficile car il y avait du monde, et pas exclusivement pour nous... Ceci dit, je suis très déçue par le son qu'on a eu, c'était nul, mais heureusement que tous les techniciens ont été sympas, ils se sont démenés pour remédier à tous les problèmes.
On te reproche d'être trop coincée sur scène?
Muriel: Pourtant j'ai l'impression que je n'ai pas été pareille qu'à l'Européen. Là, j'étais énervée, et puis j'avais très faim! Et surtout, je ne m'entendais pas, il était hors de question de bouger d'un centimètre.
Pour les prochains concerts, alors, ce sera le top niveau?
Stéphane: On va tout reprendre a zéro.
Muriel: Oui, on veut être certain que tout se passera bien.
Des propositions?
Muriel: Vaguement... Mais on ne peut pas donner de réponse parce qu'on veut un autre batteur et Christophe est à l'armée. Il va falloir tout recommencer. Normalement, c'est Thierry, de Rise and Fall of a Decade qui va faire la basse, mais il ne sera qu'intérimaire. Pour lui, ce n'est pas gênant, il a son groupe par ailleurs. Et puis il a bossé sur l'album avec nous, il connait les morceaux.
Maintenant que l'euphorie Planète Zen est passée, comment voyez-vous les choses?
Muriel: Tout sera différent. Il va falloir se débrouiller pour qu'on parle de nous, et en mieux. Les critiques n'ont pas été très indulgentes je trouve, ils nous attendaient au tournant.
Et si vous aviez quelque chose à refaire?
Muriel: Les deux concerts, vraiment...
Stéphane: Moi je referais bien tout l'album.
Muriel: Pas les morceaux, le son... Pour le prochain on ne pourra pas nous forcer la main comme pour le premier en tous cas. On a bossé dans une espèce de précipitation, et donc, forcément, on a fait des conneries. Pour les concerts ça aurait pu être dix fois pire, on n'était absolument pas prêts. On nous a fait monter sur scène à Belfort alors que rien n'était prêt! On a dû faire la balance devant le public.
Stéphane: Ce qui était drôle à Belfort, c'est qu'on a eu tous les problèmes possibles!
Muriel: Pourtant, au final, ca n'a pas été ressenti par le public, mais c'était vraiment le jonglage.
Stéphane: C'était la première fois de ma vie que je grillais une pédale d'effets! On a tout eu...
Muriel: Mais on a fait deux rappels. Et il y avait même des vrais fans, une bonne ambiance en général. Et puis on a eu une autre galère, la veille on a atterri dans un hôtel où il y avait un mariage, ils ont arrêté la sono à 3h30 du matin!
Stéphane: Bof, c'est rien ça!
Muriel: Ah si, j'étais stressée moi! J'enrageais! On est rentré plus tôt pour pouvoir dormir, et on n'a pas pu...
(S'ensuit une engueulade entre Muriel et Stéphane, l'un disant que c'est pas grave, l'autre disant que si).
Stéphane: Le pire, c'est qu'on a mal mangé (rires)!
Muriel: L'organisation était très inégale. Selon qui tu es, d'où tu viens, on ne te traite pas pareil. Nous, on était les derniers des derniers, c'est tout juste si on s'était préoccupé de nous donner à bouffer! C'était nul...
Donc, la vie de rocker, c'est pas ça?
Stéphane: Mais si...
Muriel: Ah non, franchement...
Stéphane: Oh mais moi je me suis démerdé, j'ai trouvé à manger.
Muriel: On l'a fait, mais il fallait vraiment y aller au culot pour avoir un casse-dalle, c'est pas normal quand même!
(S'ensuit une engueulade, etc, etc...)
Muriel: Heureusement que le public était content, on a même reçu quelques lettres, c'était rigolo, il y avait des gens qui hurlaient au premier rang, c'était bien plus chaud qu'à l'Européen où le public avait encore plus la trouille que nous!
Vos projets immédiats?
Muriel: Un maxi, mais pas de date de sortie prévue. On reprend Why we split différemment, et il y aura un titre en français.
Stéphane: Et surtout, le line-up a changé. Il y aura une vraie batterie, une production toute neuve, et des invités dont Pascal des Turbines qui fait la guitare en concert.
Muriel: Ca sera plus rock'n'roll!

Christophe Labussière
Frédéric Thébault







magic!
#8 - mai/juin 1996
Planète Zen
Terr...
Jamais tout à fait remis d'un engouement lenoirien sans précédent, Planète Zen coulait sous le poids d'un fardeau trop lourd à porter au sortir d'un single inaugural, Charlie The Spacedriver, sorte de manifeste noisy pop à la française. Si bien que le groupe s'essoufflait sur la longueur d'un premier album éponyme, disparaissant corps et âmes, sans même provoquer d'émois chez ses laudateurs de la première heure. Devenu d'orphelin espoir déchu après la disparition du label single KO, Planète Zen se renfermait dans un mutisme total, long de trois années. Un éloignement laborieux et finalement bénéfique pour des musiciens qui se découvraient, sur le tas, raffermis et ambitieux. D'ailleurs, Tous Les Jours De Mars, sorti de nulle part au printemps 95, affichait une maturité certaine: chant assumé, guitares diffuses, souplesse rythmique, français maitrisé - dont la chanson Plein Ciel était le miroir réfléchissant. Il ne faut donc pas s'effarer que la deuxième salve de Planète Zen renferme pareille exactitude. Derrière l'éclectisme bienvenu (un zest de groove) et le ducissement bruitiste se dessinent des mélodies souvent imparables, au milieu desquelles la voix sucrée de Muriel et ses paroles SF font merveille. Cette fois, c'est certain, Planète Zen a accompli sa mise sur orbite.
Frank Vergeade.

L'indic
Planète Zen
Terr...
A l'instar d'Autour de Lucie, par ailleurs invité remarqué de ce deuxième album, Planète Zen aime les belles ballades, les mélodies qui se scotchent d'instinct à l'oreille, les ritournelles enjôleuses et les voix très claires. Dans un format pop classique qu'ils rêvaient très grand, Planète Zen a voulu vider le trop plein noisy, le remplacant au pied levé par quelques samples amenés sans effort. Sans vraiment en souffrir, les douze titres de Terr n'en tirent pas franchement de gros bénéfices. Même si Voyager et Space Conquest rehaussent le ton general de l'album par un décor sonore ronflant d'électricité, De Mémoire tourne en rond, pris dans une boucle trop simpliste où le chant de Muriel s'égare plus qu'il n'accroche l'oreille. Les samples s'utilisent ici comme des calques plaqués sur les morceaux, ils ne s'intègrent que très rarement à la production choisissant simplement d'en modifier la luminosité et les couleurs en épargnant la structure. Certes, le pari est osé. Sauter de l'anglais au français, miser sur quelques machines pour donner l'impression de goûter à l'air du temps (Lunn) pour finalement se sentir bien plus à l'aise dans des mélodies pop classiques (Deux). L'histoire ne dit pas si Planète Zen a opéré ici un réel choix artistique ou ne s'est pas simplement contenté d'assaisonner à la sauce neo-techno-moderniste une recette qu'ils connaissent par coeur.
Julie Serge

Nouvelle vague
juin 1996
Planète Zen
Terr...
Depuis Charlie The Spacedriver, 1er single sorti en 1992, qui ne laissa pas un souvenir impérissable dans les mémoires, tant il est vrai qu'un groupe français jouant une noisy pop approximative faisait un peu tache d'huile au milieu de la prolixe production de l'époque (My Bloody Valentine, Ride et consors...), les Planète Zen ont tiré pas mal de leçons de leurs égarements du passé: 1) arrêter de singer à tout prix les groupes britanniques, 2) ne pas hésiter à chanter en français quand on connait 50 mots de la langue de Shakespeare, 3) temporiser avant de commettre un 2ème album... Le résultat est assez probant: on oscille sur Terr... entre Lush, pour les guitares vaporeuses, et Stereolab pour la diction monocorde et le goût des accords joués en boucle. Témoin: Deux, Télécryptage, ou Digital, que n'auraient pas reniés les susnommés. On trouve également sur cet album quelques titres plus <<ambiant>> du meilleur goût, comme l'imparable Lunn ou encore Spatial Sirens. Enfin, cerise sur le gâteau, les Planète Zen ont cessé d'anonner dans un anglais approximatif fin de classe de 6ème: les 3 titres de l'album chantés en anglais sont à des années lumière des balbutiements du début de carrière.
Frema

Mix
Planète Zen
Terr...
Discrets depuis un an, depuis précisement la sortie du CD cinq-titres "Tous les Jours de Mars", Planète Zen revient sur terre en force avec une double prestation discographique. D'une part, avec deux titres sur la compilation "Les belles promesses" (live par ailleurs), et d'autre part avec un album vrai de vrai, composé de douze titres plus une surprise. Ces chansons sont autant d'invitations au voyage dans la galaxie pop. A l'image des "Voyager", "Space Conquest" ou "Lunn", l'évasion est totale même si les escapades noisy restent pleines de retenue. La présence des amis d'Autour de Lucie montre d'ailleurs bien l'environnement dans lequel évolue Planete Zen: pop sans etre trop populaire, poli sans être polisson, audible en étant agréable.
Anne B.

Le bulletin
#16
Planète Zen
Aérien


Apres "une petite traversée du désert" (sic), Planète Zen sort ces jours-ci ce que l'on pourrait considérer comme son deuxième premier album. Le premier pour le label XIII Bis, le premier avec un vrai batteur et de nouvelles expérimentations sonores. Pour les pointilleux, à defaut de "vrai" premier album, on parlera de nouveau départ: nouveaux satellites, nouvelles couleurs mais climat inchangé sur la Planète Zen

On a effectivement fait un album en 92. Et puis, tout de suite après sa sortie, le label a fait faillite. Mais je précise: pas à cause de nous! Il n'avait pas vraiment couté cher ce disque. On l'avait enregistré chez des potes, les Rise & Fall. C'est eux d'ailleurs qui nous avaient mis en rapport avec le label. Apres, il y a eu une petite traversée du désert. Jusqu'à ce qu'on rencontre les gens du studio Garage. Avec eux, on a sorti un cinq titres, à très peu d'exemplaires, mais ça nous a permis de démarcher. Par l'intermédiaire d'autres copains, Tango, on a rencontré les gens de XIII Bis, ils ont bien aimé ce qu'on faisait et voilà.
Vous avez rencontré XIII Bis via Tango, Autour de Lucie est venu vous donner un coup de main pour l'enregistrement de l'abum et pour le précédent ça se passait chez Rise & Fall... C'est une histoire de famille?
Rise & Fall sont des copains d'enfance, même s'ils ont fait de la musique de leur coté et nous du nôtre. Autour de Lucie, je les connais vraiment depuis le début: j'avais passé une audition quand ils cherchaient un batteur. Tango, c'est pareil, Pascal a joué avec eux, moi je les connais depuis longtemps. Mais c'est plus une question d'entraide que de famille. On connait des gens alors autant s'aider mutuellement. C'est dejà assez difficile comme ça en France, alors on se repasse les bons plans, on participe. On a encore un côté tres naïf: tout le monde s'aide, tout le monde s'aime! En revanche, musicalement on est tous assez éloignés les uns des autres. On peut même dire qu'il y a une galaxie entre nous. Mais on partage un même état d'esprit: pas de démarche commerciale, on va à fond dans ce qu'on veut faire, sans concession.
Qu'est-ce qui a le plus changé depuis vos tout débuts?
A l'époque, on était trois, comme aujourd'hui. Il y avait Muriel la chanteuse, moi, Stephan, à la guitare et à la programmation de la boite à rythme, et Christophe à la basse. Depuis, il est parti, et Pascal est arrivé, à la batterie. Au départ, je n'écoutais pratiquement que de la noisy pop, et ça se ressentait sur ce qu'on faisait. Vu que je ne savais pas du tout jouer de guitare, c'était facile: je branchais une disto, j'envoyais deux accords... ça sonne tout de suite, ça fait du bruit et quand tu fais du bruit les gens ont l'impression que tu sais jouer! Maintenant on travaille beaucoup plus les compos. Il y a des choses qu'on retrouve mais on essaye d'élargir au maximum et d'avoir vraiment un son à nous, de mélanger l'électronique avec l'acoustique, la pop à des rythmes plus technos - il paraît que les jeunes aiment bien ça! Sauf qu'on a une approche un peu à l'envers d'un groupe de techno qui lui part vraiment du son, des boucles et qui progresse. Nous on part de vraies chansons, complètement pop, et une fois ces chansons finies, on rajoute des boucles, des samples, des bruitages.
Et le contexte, il a changé lui aussi?
Il y a de plus en plus de groupes pop en France et surtout de plus en plus de bons groupes. Meilleurs que les groupes anglais autour de qui on fait une hype et qui sont oubliés au bout de deux singles.
Ici il faut beaucoup plus de temps pour y arriver. Il faut faire ses preuves, alors forcément à l'arrivée on est plus vieux. Un groupe anglais a 17 ans, il est signé. En France, en moyenne, il faut attendre 10 ans de plus! Mais là j'ai l'impression que c'est une meilleure période pour nous. En ce moment les français s'intéressent de plus en plus à la pop britannique, et ça pousse aussi les groupes français. Ca va s'installer petit à petit, c'est lent à venir mais la pop en France va gagner ses lettres de noblesse comme le rap avant elle. Il recommence à y avoir un public, les groupes ont plus de personnalité, copient moins sur ce qui se fait ailleurs, bref ça a l'air bien parti.
Pour vous aussi il y a quelques années ça paraissait déjà bien parti, et pas qu'en France...
Un magazine finlandais avait même fait une pleine page sur nous alors que le disque n'était même pas distribué là bas, et ça a suscité tellement de curiosité qu'une K7 pirate a été éditée. On a appris ça l'an dernier par des finlandaises qui sont venues nous voir en concert. La K7 circulait et passait meme en radio. Planète Zen était écouté là-bas au même titre que n'importe quel groupe noisy pop anglais ou américain. En entendant les Breeders elles ont même pensé que le groupe avait copié sur nous! C'est avec ce genre d'anecdote qu'on se rend compte qu'on a vraiment fait un faux départ.
E.G.D.

Transfac
No 103 - Mai 96
Planète Zen
Terr...
De déveines en actes manqués, Planète Zen a fait un passage furtif mais marquant dans la scène pop française. Aujourd'hui, ils sont de retour sur "Terr", un pied dans la pop, l'autre dans la techno. L'invitation au voyage s'ouvre avec "Deux", hit potentiel aux mélodies imparables sur lesquelles Muriel Bonfils place son chant monocorde et délicat. L'apparition de samples et de boucles a fait muter le son, et l'on ne s'étonnera pas si un morceau comme "Lunn" lorgne vers la techno... Esprit de famille oblige, Autour de Lucie est venu prêter main forte aux spationautes de la Planète Zen, en mission pour vous faire découvrir leur bonne musique populaire moderne from outer space...


Les évadés de la planète des sages

Un soir, Bernard Lenoir voit atterrir sur son bureau "Charlie the Spacedriver", 1er single de Planète Zen, et décide de leur donner un coup de pouce. Aujourd'hui, pour la sortie de leur nouvel album "Terr", c'est à notre tour d'établir le contact avec ces êtres venus d'ailleurs...
Stephan: Bon! Que les choses soient claires! Le premier qui me demande pourquoi on s'appelle Planète Zen, je le désintègre...
Vous souvenez-vous de l'origine de votre planète?
Muriel: Pas vraiment, cela fait quelques années, quelques années lumiere déjà...
Stephan: Comme pour toutes les autres planètes, il y a eu rencontre de petits astéroides, vers 92, d'une ère oubliée. En chemin, on a perdu notre bassiste, car il s'est fait enlever par des extra-terrestres. Aujourd'hui, on en cherche désesperément un autre! On a également troqué notre ancienne boite à rythmes contre un vrai batteur humain tout neuf. Tout ça contribue au nouveau son de cet album.
Muriel: En fait, c'est Bernard Lenoir qui nous a aidés à nous faire connaitre. Au cours d'une session spéciale Single K.O., il a passé deux démos qu'il aimait beaucoup. Il y a eu une demande du public, et pour y répondre on a sorti un single 4 titres qui a bien marché. L'album est venu quelques mois plus tard, mais manque de bol, le label a déposé le bilan peu après... (Rires) On ne s'est pas arrêtés là, on a continué à travailler, et enregistrer des titres pour un autre album qui n'a jamais vu le jour, pour des raisons un peu longues à expliquer ici.
Aujourd'hui vour réapparaissez sur un nouveau label avec un nouveau disque. Tout ça s'est fait rapidement...
Stephan: C'est un peu grâce à Fred Fortuny, du groupe Tango, que l'on s'est retrouvés chez XIII Bis records. Il ne faut pas rêver. Dans ce milieu, si tu n'es pas parrainé, les choses sont beaucoup plus difficiles. A partir du moment ou on a été signés, le label nous a demandé de rentrer rapidement en studio! Ca ne nous a pas posé de probleme, car on a l'habitude de travailler dans l'urgence, notre premier album a été également réalisé dans ces conditions.
Muriel arrivait au studio, se mettait dans un coin, écrivait des textes, on les enregistrait dans la foulée... (Rires) Pour celui-ci, même combat, il y a pas mal de textes et de musiques qui ont été écrits sur place! On ne savait même pas quelles tronches auraient les morceaux avant le mix, car on a enregistré un tas de pistes, on a balancé plein d'idées à droite et à gauche. Et c'est seulement lors du mix qu'on a décidé de mettre telle ou telle piste, une guitare par ci, un sample par là. Petit à petit, tout ça a pris forme! Mais on peut dire de cet album qu'il représente un instantané, juste quinze jours dans la vie de Planète Zen.
Muriel: Peut être qu'un jour on sortira un disque fait sérieusement! (Rires)
On reconnaît le son "made in Planete Zen", mais la musique a évolué!
Stephan: Nous n'avons pas voulu rester dans notre créneau noisy pop. Pour éviter d'être à la traine, il faut savoir se nourrir de ce qui nous entoure. Ca n'a rien à voir avec une démarche commerciale, mais ça correspond à une logique d'ouverture d'esprit.
Muriel: C'est vrai. Depuis que Stephan s'est téléporté dans les sphères ou l'on écoute de la techno, il a eu une révélation! Je ne pense pas qu'aller dans la direction où le public nous attend soit une démarche intéressante. Ca ne doit pas fonctionner dans ce sens-là, c'est le public qui doit nous suivre. On ne se fixe pas de contraintes pour qu'on nous reconnaisse à la première écoute. Si notre goût du moment avait été ska, on aurait très bien pu faire un morceau de ska!
Quelques titres de l'album sont en français. Pensez-vous que les quotas vont vous aider?
Muriel: Si le premier album était entierement en anglais, c'était avant tout le fruit du hasard. A l'époque, j'avais également des textes en français. Mais ce n'est pas une légende, il y a vraiment un problème de rythmique dans notre langue. Il est plus difficile d'écrire des textes qui soient cohérents et qui sonnent bien, car notre vocabulaire chargé de sens est souvent trop long pour en faire des phrases intelligibles. Je prends les textes comme ils me viennent, indifféremment dans une langue ou l'autre, je ne réprime rien. Quant aux quotas, je n'y crois pas deux secondes! On a déjà vu ce que cela donnait sur l'espèce de monopole détenu par Fun, Skyrock et NRJ! La seule chose qui ait changé, c'est deux fois plus de MC Solaar et dix fois plus de Cabrel ou Bruel. Les programmateurs radio ne prendront aucun risque sur des petits groupes comme nous...
Stephan: Par contre, l'effet visible des quotas est le nombre de groupes chantant en français signés un peu partout. Il y a eu quelques petits malins qui ont bénéficié de cette mesure gouvernementale, car les maisons de disques se sont ruées sur les premières maquettes à peu près correctes. Il faudra juste faire un bilan, dans un an ou deux, pour voir s'il y a, dans le lot, des gens vraiment intéressants. Il y a un autre effet pervers prévisible, c'est la recherche systématique de pâles copies françaises de groupes anglais qui cartonnent.
Y a-t-il des artistes avec lesquels vous aimeriez travailler?
Stephan: Si l'occasion se présentait, ce serait dans le cadre de remixes d'un single. J'aime beaucoup la tournure techno qu'a pris Daft Punk, je les avais vus à l'époque ou ils s'appelaient encore les Darlings, mais compte tenu de leur succès, ils doivent être assez inaccessibles. Sinon, en international, ça ne me déplairait pas du tout de confier quelques bandes aux Chemical Brothers... (Rires)

Jacques Pellet